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Mesures exceptionnelles pour l’exercice des droits de vote 2020

By Murielle HERMELLIN

29/04/2020

Exceptionnellement, la plupart des assemblées générales 2020 ne réuniront pas physiquement les actionnaires… « Distanciation sanitaire Covid-19» oblige.

AG 2020 à huit clos

En effet, en application de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, le gouvernement a pris par ordonnance (en date du 25 mars) plusieurs dispositions pour simplifier et adapter les règles de convocation, d’information, de réunion et de délibération des assemblées générales. Ainsi, les AG se tiennent actuellement et jusqu’à nouvel ordre, à huit clos et les actionnaires ne peuvent exercer leur droit de vote qu’à distance, soit par i) correspondance via un formulaire de vote, ii) procuration au Président, iii) Internet via une plateforme sécurisée à, condition d’une part que l’émetteur ait souscrit au service et, pour l’actionnaire au porteur, que sa banque ait effectué les développements informatiques nécessaires. L’AMF, dans un communiqué du 27 mars encourage vivement les actionnaires à exercer leur droit de vote, « prérogative fondamentale de l’actionnaire, essentielle au bon fonctionnement et à une saine gouvernance des émetteurs ».

Les émetteurs, de leurs côtés, ont été tenus de mettre en place le plus tôt possible avant l’AG une communication claire sur les modalités de participations possibles, les modalités pour poser des questions en amont, les modalités pour suivre l’AG en format vidéo ou audio etc…Certaines sociétés cotées (LVMH, Scor, Vinci, Worldline… ) ont déjà annoncé leur décision de reporter la tenue de leur AG de plusieurs semaines, report autorisé exceptionnellement jusqu’à 3 mois supplémentaires. Dans les autres pays, la tenue des AG à huis clos a été adoptée de manière plus ou moins similaire. En Suisse, notamment, où le Conseil Fédéral a été l’un des premiers gouvernements à l’imposer, avec somme toute quelques différences notables comme la non obligation de retransmission de l’AG. En Allemagne, les AG virtuelles peuvent désormais se tenir même si les statuts ne le prévoient pas et les sociétés ont désormais 12 mois pour tenir l’AG après la clôture des comptes (au lieu de 8 mois habituellement). Au UK, les AG peuvent être repoussées de 2 à 3 mois ou, si les statuts le prévoient, être tenues sous format virtuel. Quant aux Etats-Unis, les AG virtuelles sont (déjà) autorisées dans 41 Etats, mais seulement avec l’accord des actionnaires, qui ont alors un code pour voter en direct.

Quid des questions des actionnaires minoritaires?

Difficile donc cette année pour un actionnaire minoritaire « actif » de s’exprimer et d’initier un débat en direct avec le management : les questions orales sont en général écartées d’entrée de jeu, pour des raisons techniques ; les questions écrites sont quant à elles recevables mais envoyées plusieurs jours en amont, en recommandé, avec attestation de détention de titre (1 seul suffit). Quelques entreprises ont tenté de favoriser un peu plus l’interactivité entre les membres du conseil présents et les actionnaires, comme Vallourec, fabricant français de tubes en acier pour le secteur de l’énergie : son assemblée générale, qui s’est tenue le 6 avril 2020, a permis aux actionnaires un échange en direct avec le conseil via l’outil de diffusion de l’AG sur internet. Total prévoit de son côté la possibilité d’écrire les questions sur la plate-forme de retransmission, accessible trois jours avant le jour J. Patrick Pouyanné, Président du groupe, a prévu d’y répondre pendant une heure.

Qu’en est-il des résolutions externes ?

Déposées le plus souvent par les actionnaires salariés et des coalitions d’actionnaires minoritaires, les résolutions externes sont généralement la conséquence d’un long dialogue qui n’a pas abouti entre émetteurs et investisseurs. Si les salariés portent principalement leurs résolutions externes sur le niveau du dividende et ses modalités de versement, les actionnaires minoritaires portent quant à eux essentiellement les sujets de composition du conseil.

Comment dépose-t-on une résolution externe en AG (en France)

L’inscription d’un projet de résolution en AG est régi par la loi. Elle exige i) la présentation de la résolution au conseil d’administration de la société émettrice cible : 20 à 10 jours calendaires après publication de la convocation de l’AG au BALO (Bulletin des Annonces Légales Obligatoires) ii) la preuve de détention du nombre d’actions par les co-déposants iii) des conditions d’inscription spécifiques : texte au format légal ; envoi au président du Conseil/Directoire de l’émetteur avec le nombre légal d’actions requis (de 0,5% à 5%). Le Conseil se prononce sur le projet de résolution, validant ou non son inscription à l’ordre du jour de l’AG. Selon les statistiques de Proxinvest, société de conseil en votes, depuis 2006 portant sur un périmètre de 300 sociétés cotées françaises, il y a en moyenne une vingtaine de résolutions externes déposées chaque année, avec des pics comme en 2009 (62 résolutions déposées essentiellement aux AG d’Anovo, Gécina et Bricorama) ou encore en 2017, avec 73 résolutions externes (dont 57 pour l’AG de Solocal !).

Qui dépose des résolutions externes ?

Toujours selon l’Etude Proxinvest, en 2019 les résolutions ont été déposées à 61% par des coalitions d’actionnaires minoritaires (Scor, EssilorLuxoticca (2), XPO Logistics europe, Marie Brizard Wine&Spirit (19) et Virbac) – 21% par les salariés (EDF, EssilorLuxotica, Marie Brizard Wine & Spirit, Orange (4)) – et 18% par le 1er actionnaire (Bilendi (7))

Parmi les acteurs engagés en France dans le dépôt de résolutions externes, on peut citer la société de gestion Phitrust qui pratique cet exercice depuis plus de 15 ans auprès du CAC40, à travers sa sicav Phitrust Active Investors France. Sa méthode repose sur un process progressif commençant toujours par un dialogue privé actif et direct auprès des dirigeants (entretiens, courriers, rapports…) suivi si nécessaire, c’est-à-dire quand le dialogue privé n’aboutit pas à des initiatives publiques commençant par des réunions d’investisseurs, des communiqué de presse, des questions écrites, et en dernier ressort, des dépôts de résolution externes avec d’autres actionnaires minoritaires ou avec les PRI ou autres ….Depuis, sa création en 2003, cette Sicav a déposé 45 projets de résolution dans les assemblées générales du CAC40. Parmi les sujets ciblés : les rémunérations, les droits de vote, les dissociations des fonctions de Président et Directeur Général, ou encore des sujets environnementaux. Concernant les droits de vote on citera en particulier deux résolutions déposées en 2005 chez Alcatel-Lucent et en 2007 chez Vivendi pour la suppression des limitations de droits de vote qui ont obtenu respectivement 70% et 71% des suffrages et ont donc été adoptées ou encore des résolutions contre le droit de vote double déposées aux AG de Vivendi et Orange en 2015 et d’Accor en 2017 qui ont respectivement obtenu 50,1%, 43,3%, 54% des voix, mais n’ont pu être adoptées faute des 2/3 des voix nécessaire pour les changements de statut.

Cette année, parmi les projets de résolutions externes en cours, il y aura peut-être celle d’un groupement de onze investisseurs européens coordonné par la société de gestion Meeschaert AM pour l’AG de Total le 29 mai. L’objectif de la résolution est de modifier les statuts du groupe pétrolier afin de renforcer la contribution de son modèle économique à l’atteinte de l’Accord de Paris sur le climat. En pratique, il est demandé à Total de préciser son plan d’actions à moyen et long termes assorti d’étapes intermédiaires, ainsi que les moyens déployés pour réduire en valeur absolue ses émissions de gaz à effet de serre. Ce plan doit intégrer les émissions indirectes (scope 3), dans la mesure où l’utilisation des produits vendus représente 85 % des émissions de gaz à effet de serre du groupe. A l’heure où cette note est rédigée, Total n’a pas encore communiqué au groupe d’investisseurs la recevabilité de ce projet de résolution externe. A suivre, d’autant que Total vient d’inscrire à l’ordre du jour de son AG une modification statutaire, prévoyant d’ajouter aux pouvoirs des administrateurs la responsabilité de la prise en considération des enjeux environnementaux et sociaux de son activité comme leur avait demandé Phitrust.

Autre attente, et de taille, l’assemblée générale du groupe Lagardère qui se tiendra mardi prochain 5 mai. Ce sera semble-t-il l’un des dossiers les plus attendu et les important de la saison 2020 : l’AFG elle-même invite les actionnaires à être très attentifs à cette assemblée générale qui s’inscrit dans un contexte particulier d’enjeux de gouvernance. En effet, pour cette AG 15 résolutions externes ont été déposées par le fonds activiste Amber Capital, désormais premier actionnaire (18% du capital et 14% des droits de vote). L’enjeu est de faire évoluer la gouvernance du groupe, avec entre autres le remplacement de 8 membres du conseil de surveillance : 7 résolutions visent à révoquer 7 membres du conseil de surveillance siégeant avant l’AG et 8 résolutions visent à nommer 8 nouveaux membres, indépendants et externes, au conseil de surveillance avec en tête Patrick Sayer, ancien Président du Directoire d’Eurazeo. Depuis plusieurs mois Amber Capital dénonce le statut de société en commandite par actions, qu’il juge responsable de la sous-performance financière de la société dirigée par Arnaud Lagardère et critique la politique d’investissement et de désinvestissement. Amber qui a mené une campagne remarquée se voit opposer deux « chevaliers blancs » qui se rangent au coté d’Arnaud Lagardère : Vivendi, qui détient désormais plus de 10% du capital, et plus discrètement Marc Ladreit de Lacharrière, PDG de Fimalac, avec 3.5% du capital. L’arbitre pourrait finalement être le fonds souverain qatari qui détient 13% du capital, mais 20% des droits de vote…Le bras de fer bat son plein !

L’approbation des résolutions externes est dans son ensemble assez variable. Cependant, de façon générale, les résolutions proposées par les actionnaires salariés sont adoptées, alors que pour les autres les minoritaires c’est moins fréquent. Parmi les plus remarquables, outre les succès de Phitrust mentionnés précédemment on peut citer le succès de l’association RegroupementPPLocal chez Solocal, ou encore, en 2004 le renversement du conseil d’administration d’Eurotunnel.

Chez Promepar AM, nous exerçons nos droits de vote, par correspondance, essentiellement sur les titres que nous détenons dans les sociétés françaises composant l’indice SBF 120. Avant chaque vote, nous analysons toutes les résolutions, internes comme externes et définissons notre choix en fonction des principes de notre politique de vote mais aussi après analyse des recommandations de l’AFG, d’études externes et des lettres conseil de Proxinvest, agence spécialisée dans la gouvernance d’entreprise, et de notre analyse financière interne. Nos principes de vote visent à promouvoir la valorisation à long terme des investisseurs à encourager la transparence, la cohérence, l’intégrité, l’équité et le développement durable. Notre politique relativement contraignante nous amène régulièrement à nous opposer aux augmentations de capital sans droit préférentiel de souscription, ainsi qu’aux rémunérations excessives. Nous savons cependant nous adapter à des conditions exceptionnelles, temporaires pour accompagner le mieux possible les entreprises sur le long terme et veiller aux intérêts des actionnaires minoritaires.

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