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Flash Marchés

La baisse des marchés rend-elle les sociétés foncières cotées plus attrayantes ?

Par Jérôme LIEURY

23/04/2020

L'actualité de l'économie et de la finance !

1 – Rappelons que les sociétés cotées dont la mission est d’investir dans l’immobilier, encaisser des loyers et les redistribuer à leurs actionnaires ont un statut fiscal particulier : le statut de SIIC (en France), très semblable au statut de REITs aux USA et d’autres sociétés foncières cotées dans d’autres pays. Sous ce statut quasiment universel, ces sociétés foncières sont dispensées de payer de l’impôt sur les sociétés (IS) mais doivent redistribuer presque tout de leur résultat : en gros les loyers encaissés moins les charges de gestion et les frais financiers, sous formes de dividendes, ce qui est bien normal.

Rappelons aussi qu’une foncière étant une société d’un type particulier, il convient de juger de sa valorisation boursière avec des critères particuliers aussi, à savoir la décote et le rendement :

  1. la décote est la différence entre la valeur d’actif net réévalué de la société, en gros la valeur de marché de son patrimoine diminué de son endettement, et sa valorisation boursière. Toute société foncière publie régulièrement une valeur d’actif net réévalué par action, et il est de bon ton que le cours de Bourse soit nettement inférieur à cette valeur, et affiche donc une décote.
  2. le rendement : le dividende rapporté au cours de Bourse, est aussi un critère important, et plus que pour les actions de sociétés d’autres secteurs, puisqu’une SIIC doit distribuer un dividende régulier, alimenter par les revenus réguliers des loyers perçus sur les immeubles.

2 – Ayant suivie la baisse des marchés d’actions, cf l’indice parisien Cac 40 à -25% environ depuis le début de l’année, les sociétés foncières affichent presque toutes des décotes significatives (>20%) par rapport à leurs valeurs d’actif net réévalué, et procurent presque toutes en principe des rendements confortables (>6%) avec les dividendes annoncés pour 2019 :

3 – On trouve les plus fortes décotes et les plus forts rendements chez les foncières de galeries marchandes : Unibail-RW, Klépierre, Carmila, Mercialys, qui sont les plus exposées au confinement, puisque les dites galeries marchandes sont fermées, ou plus ou moins désertes en tout cas, et leurs locataires commerçants ne font pour le moment pas de chiffre d’affaires, soit un risque important sur les loyers. La négociation sur des remises, des décalages de paiements etc… étant a priori très différente selon que le locataire est un petit indépendant détaillant multimarque, ou au contraire une grande enseigne qui génère du trafic en temps normal et sert de locomotive à la galerie.

Klépierre et Carmila souffrent de plus éventuellement de leur exposition à l’Italie, et Mercialys de sa proximité avec le Groupe Casino, à la fois son premier actionnaire et son premier locataire, qui traîne une situation bilancielle lourde.

4 – Les foncières de bureaux : Icade, Société de la Tour Eiffel, Gecina et Foncière Inea sont moins exposées et donc moins décotées. Icade n’est toutefois pas une pure foncière, avec une branche promotion et développement immobilier. Gecina a un patrimoine très parisien, mais de qualité très variable, entre de beaux immeubles de bureaux + commerce dans les 8ième et 9ième arrondissements, des logements construits dans les années 1970 dans les 15ième et 13ième arrondissements, et des locaux variés en première et deuxième ceinture. Société de la Tour Eiffel est une foncière de bureaux qui investit en dehors de Paris Intra-Muros et principalement dans l’Ouest parisien, de Nanterre à Palaiseau, et table sur les développements à venir avec la mise en service des lignes du Grand Paris Express. Foncière Inea investit dans des immeubles de bureaux dans les nouvelles zones tertiaires des grandes métropoles régionales, des marchés très porteurs ces dernières années.

5 – Ceci étant, même si l’immobilier coté offre une bonne visibilité, il a aussi de vrais risques :

  1. 2020 va être une année un peu terrible pour l’immobilier commercial, avec vraisemblablement des remises conséquentes sur les loyers des murs de boutiques pour cause de Grand Confinement.
  2. l’immobilier de bureaux est un marché très bien orienté depuis des années, principalement à Paris, qui attire des investisseurs globaux, où les taux de vacances sont faibles, et où les prix sont élevés, avec des rendements des immeubles de l’ordre de 3 à 4%, contre 5 à 6% ailleurs, mais il n’en a pas moins un cycle : le cycle économique général peut éventuellement se retourner, soit moins de locataires, des révisions de loyers en baisse, et des valeurs d’immeubles en baisse aussi en conséquence. D’autant que la demande pour l’immobilier tertiaire haut de gamme de centres villes a vraisemblablement été tirée de façon un peu artificielle ces dernières années par de nouveaux intervenants : les loueurs d’espaces de coworking, dont certains, tel WeWork, sont en perte et mal financés, et pourraient disparaître brutalement, ce qui pourrait remettre brutalement de nombreuses surfaces sur le marché. Et d’autant aussi que le télétravail pourrait se développer beaucoup suite au confinement, soit une demande éventuellement moins soutenue pour les mètres carrés de bureaux. Encore que rien ne soit sûr à ce sujet : les besoins de distanciation pourraient éventuellement avoir l’effet radicalement inverse.
  3. les valeurs d’actifs nets réévalués, ou ANR/action, sont calculées par des experts indépendants, en estimant immeuble par immeuble le patrimoine d’une société foncière sur la base de taux de capitalisation des loyers : ces estimations peuvent donc baisser si ces taux de rendements exigés étaient revus en hausse dans un contexte de remontée des taux d’intérêts. Laquelle arrivera peut-être un jour même si cette perspective semble encore bien éloignée à présent. Et même si les taux de capitalisation retenus aujourd’hui sont de l’ordre de 6%, ce qui laisse une marge de sécurité a priori.

Bref : de vraies décotes, de bons rendements, mais la visibilité n’est plus ce qu’elle était.

En attendant qu’elle s’améliore à nouveau ? Vraisemblablement.

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