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Banques centrales, monétisation et après ?

Par Brigitte TROQUIER

07/05/2020

Depuis le début de la crise, les banquiers centraux ont actionné tous les leviers à leur disposition pour apporter la liquidité qui leur semblait nécessaire face à un tel évènement.

Et ces derniers sont allés bien plus vite et ont agi bien au-delà de ce qui avait été mis en oeuvre à la suite de la crise de 2008. Du côté des pays avancés, les banques centrales qui avaient encore une marge de manoeuvre en matière de taux d’intervention l’ont exploitée mais ils étaient finalement peu nombreux. Dans un contexte sans inflation où des signes avancés de ralentissement de la croissance se multipliaient, elles avaient déjà, pour beaucoup d’entre elles, utilisé ces munitions. C’est pourquoi, très rapidement, les banques centrales sont passées à un stade supérieur et ont multiplié mesures conventionnelles ou non conventionnelles avec un seul objectif : fournir toute la liquidité nécessaire aux banques afin qu’elles soient incitées à répercuter cet apport à leurs clients. Les autorités monétaires ont réduit les exigences en fonds propres des banques afin qu’elles soient plus enclines à répondre aux besoins des ménages et des entreprises qu’elles soient petites ou plus grandes. Elles ont augmenté les montants disponibles dans les opérations de refinancement des banques tout en assouplissant les conditions auxquelles elles peuvent emprunter si elles augmentent les crédits. Du côté des marchés, les institutions monétaires ont réagi aux nouvelles tensions qui émergeaient sur des actifs spécifiques en s’engageant sur le marché. Ainsi en a-t-il été de ceux des administrations locales aux Etats Unis ou de la dette souveraine des pays de la zone euro. A ce titre, leur activisme est impressionnant et semble sans limite, enflant brutalement la taille du bilan de ces institutions. Celui de la Fed a été multiplié par 1,5 en l’espace de quelques semaines à près de 6 700 Mds $ soit le tiers du PIB américain. En zone euro le bilan de l’Eurosystème n’avait pas diminué depuis la crise et à 5 400 Mds €, il est à présent proche de 45% du la richesse de l’UEM.

Dans les pays émergents, confrontés à la pandémie et à la crise économique, la boite à outils des Banques Centrales est moins étoffée et les marges de manoeuvre souvent plus contraintes. Les risques économiques et financiers qui ont émergé ont immédiatement ricoché sur la parité de leur devise. Fuites de capitaux, dégradation des taux de change, risques inflationnistes, constituent des variables qui limitent leur marge de manoeuvre en matière de taux d’intérêt même si elles ont néanmoins actionné cet outil. La brutale hausse des primes de risque sur les marchés obligataires souverains ou d’entreprises et la dégradation des indices boursiers ont conduit à d’insoutenables resserrements des conditions monétaires. C’est pourquoi, certaines institutions, quand la taille de leurs marchés financiers le permettait, se sont petit à petit lancées dans une forme d’assouplissement quantitatif. C’est le cas en Amérique latine du Chili ou de la Colombie, le Brésil s’y préparant. En Asie, l’Indonésie les Philippines, la Thailande s’y sont lancés, la Pologne ou la Turquie en Europe l’ont aussi adopté. Les modalités peuvent différer d’une banque centrale à l’autre mais l’objectif est identique : permettre un financement de la dette publique et de l’économie indispensable pour atténuer les effets de la crise à des prix « raisonnables ». L’adoption de cette mesure d’urgence pour éviter une paralysie économique laisse néanmoins planer un réel risque de dérapage des prix qui a été mis au second rang des préoccupations des autorités monétaires.

Dans un contexte sanitaire et économique inédit, les banquiers centraux dans les pays avancés et les pays émergents ont déployé un arsenal de mesures qui lève nombre de tabous sur la création monétaire. A court terme, la nécessité de ces interventions fait peu polémique. La nécessaire monétisation de la dette publique semble la seule solution évidente dans la crise. En sortie, ces masses de liquidités portent un nouveau risque d’instabilité financière qui dépendra des choix réalisés par ceux qui la détiennent. Il ne serait néanmoins pas surprenant qu’apparaissent de nouveaux excès tant sur les marchés financiers que sur les actifs réels. Mais ce ne sera qu’après…

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